> Raphaël <

Nous partons après-demain, et je commence à sérieusement m'inquiéter pour Clémentine, je n'ai aucune nouvelle depuis la soirée où je l'ai trouvée au restaurant. J'ai essayé de sonder Joey pour savoir s'il avait eu des nouvelles, il est resté très évasif, simplement que la directrice était au courant et que ses parents avaient fait le nécessaire pour lui faire l'école quelque temps à la maison. Je n'ai aucune idée de quand elle va revenir... Si elle va revenir. Elle m'a dit que sa mère était plutôt intrusive et surtout très lourde, c'est sûrement dû à cette soirée, le fait qu'elle ait découché, je m'en veux, car j'aurais dû insister pour la ramener. On aurait trouvé une excuse pour le retard, ou alors ça n'aurait fait qu'empirer les choses. Vous allez me demander pourquoi je suis si inquiet pour une fille que je ne connais même pas finalement, je ne sais pas je suis complètement attiré par son côté fille fragile qui cache de lourds secrets, elle est mystérieuse, intrigante et je me sens un peu coupable, je n'ai pas joué le super mature sur ce coup-là La sonnerie retentit, j'attends Joey, nous devons donner les dernières informations aux élèves pour la sortie. Il ne devrait pas tarder, ou alors il m'avait peut-être dit de le rejoindre en classe, ouais, c'était peut-être plutôt ça. Merde ! 

La porte de sa classe était toujours ouverte, Joey me fit un grand sourire. 

- Excusez-moi !

Dans l'excitation du retard, je n'avais même pas prêté attention à Clémentine qui était installée au fond de la classe, elle me fit un sourire discret quand nos regards se sont croisés, j'étais plus gai que gay, si elle est de retour, je suppose que sa mère est d'accord pour la laisser partir, enfin si ce n'est pas le cas ce serait vraiment atroce de laisser son enfant revenir pour voir les autres préparer leur sortie scolaire. Quel genre de mère, peut-elle être pour faire ça à son enfant ? Pendant près d'une heure, nous avons distribué des feuilles dictant des règles en tous points, celles que nous pensons obligatoires pour le bon déroulement du séjour. Il ne peut pas y avoir de débordement, c'est le moment où les touristes affluent en plus grand nombre à cette période alors il est hors de question qu'on paume un gamin, ou qu'on finisse par devoir aller en chercher quelques-uns au commissariat. Ils n'ont de toute façon pas le choix, car si une incartade est commise, c'est toute l'école qui sera pénalisée, car les sorties scolaires seront annulées. Alors ils ont mieux fait de se tenir à carreau. 
C'est la fin du « cours », demain, ils n'auront pas cours pour finaliser leurs bagages. Ils se croient déjà en vacances vu comment ils se poussent pour sortir de la salle cette bande de sauvages putain, mais on est vraiment con quand on est pubère. Les filles sont quand même bien plus intelligentes, elles prennent leur temps et finissent par sortir en même temps que les sauvages. Joey interpella Clémentine, je me suis mis en recul, ça ne me regarde pas vraiment, mais je laisse quand même mon oreille traîner. 

- Clémentine, je sais que tu as une heure d'étude-là tu dois repasser ton examen d'Espagnol si tu veux pouvoir partir avec nous.
- Je compte bien partir avec mes camarades MONSIEUR !
- Ravi de l'entendre Clémentine, la proviseure t'attend, tu vas le repasser dans son bureau.
- Merci. Au revoir. 

J'ai loupé un épisode ? Vu le ton que Clémentine emploie, j'ai bien l'impression que ya un truc qui tourne pas rond, ou alors elle est juste de mauvaise humeur, à peine elle revient, qu'elle doit passer un examen. J'avais d'ailleurs complètement oublié que c'était la condition pour qu'elle vienne à la sortie, j'espère qu'elle va le réussir du coup, ça serait dommage qu'elle reste deux semaines ici alors qu'elle pourrait découvrir une île vraiment jolie quand elle n'est pas gâchée par ces idiots de touristes égoïstes. Et je suis sûr que Clémentine est le genre de nana qui se contre-fiche de se salir les mains. Joey me sortit de mes pensées, nous devions encore discuter de deux trois petites choses et je pourrais rentrer chez moi pour farniente sous ma tente. Je dors plutôt mal, pour cause, depuis un mois, j'ai une chouette qui hulule sur le toit, je ne l'avais jamais vue là auparavant, mais je n'ai pas le cœur à la faire partir, quand on y pense est ce que c'est vraiment ma place de crécher sur un toit ? En trente minutes, tout a été bouclé, c'est une affaire rondement menée. 

- A mercredi Joey
- Sans faute à trois heures du matin ! Si ça peut faire dormir la bande de sauvageons une grande partie du trajet ça m'arrangerait. 
- Pour sûr ! Je suis même sûr que certains vont faire nuit blanche ! 

Je sortis de la salle rapidement, Clémentine sortait du bureau de la proviseure, je voulais à tout prix savoir si elle pensait l'avoir réussi avant de partir, si je ne la vois pas mercredi au bus, je vais être déçu alors si je peux me préparer avant psychologiquement. 

- Bonjour Clémentine
- Salut ! 
- Ça va ? Qu'est-ce qu'il s'est passé ? 
- J'ai été consignée
- Pendant un mois ? Je suis vraiment désolé ! 
- Je t'avais dit que ma mère avait un grain. Non ce n'est pas de ta faute. 

Joey avait fait son apparition près de la porte, je suis sûr qu'il écoute ce qu'on se dit. 

- On ne peut pas trop parler ici Raphaël, il y a des oreilles partout.

Avant même que je ne puisse lui répondre la proviseure s'est ramenée d'un pas lourd.

- Mademoiselle Chenille, vous feriez mieux de vous dépêcher, les professeurs ne sont pas à votre botte, ils ne sont pas là pour vous attendre à tout bout de champ. Quant à vous Monsieur, nous devons voir ensemble deux trois choses. Veuillez me suivre.

Si cette femme avait un fouet dans les mains, elle l'aurait utilisé, j'ai l'impression d'être un minot qui se fait engueuler par sa maîtresse d'école, c'est très gênant. Clémentine avait récupéré un bouquin dans son casier avant de partir au pas de course. 

- Tout est bouclé pour cette sortie scolaire ?
- Oui madame. 
- Très bien, je compte sur vous pour qu'il n'y ait aucun écart. 
- Entendu madame. 
- Vous pouvez partir. 

Plus froide qu'un iceberg celle-là. En voyant le casier de Clémentine une idée m'est passée par la tête. Et si je lui glissais mon numéro dedans ? Je ne peux pas prendre le sien vu que je ne sais pas quand je pourrais la joindre avec sa mère dans les parages alors c'est sûrement plus facile que ce soit elle qui m'appelle si elle en a envie. Personne dans les couloirs. J'y ai glissé un petit bout de papier avec un numéro inscrit avec une écriture de cheval. Et je suis sorti en sifflotant ni vu ni connu.